Les Compagnons de Fidélité Gaulliste de Normandie sont en deuil : Ferdinand Lecouvey, Président de l’Amicale des anciens de la 2e DB du Calvados, vient de nous quitter le 26 août 2023, dans sa 99e année. Beaucoup d’entre eux sont venus s’incliner, lors de ses obsèques le 1er septembre dernier à Barbery (Calvados), avec respect, avec émotion et avec reconnaissance devant l’Homme qu’il fut, un homme de passion, de volonté et d’engagement.

Avec son départ vers l’autre rive, c’est un peu de cette formidable épopée des « gars de Leclerc » qui s’éloigne plus encore de notre monde contemporain.

Ferdinand Lecouvey fut en effet de tous les combats pour sauver l’honneur français derrière le Général de Gaulle, pour libérer le territoire national, sous la conduite du Général Leclerc, et défendre une certaine idée de la France et de la dignité de l’Homme, dans la guerre comme dans la paix.  

Sa vie aura été profondément orientée, marquée, inspirée par ce sens du service : le service des autres et le service de la France et ce, dès son plus jeune âge.

Enfant né dans le Nord de la France et installé chez ses grands-parents à La-Haye-du-Puits (Manche) peu avant le conflit, il vit, le cœur lourd, l’arrivée des troupes allemandes et la période d’Occupation.

Le 1er août 1944, la 2e DB du Général Leclerc débarque dans les dunes de Saint-Martin-de-Vareville, à Utah Beach. « L’arrivée sur notre sol de la 2e DB et de son chef, le Général Leclerc, auréolés de leurs victoires en Afrique, nous redonna espoir de libérer la France et c’est ainsi que se décida notre engagement », dira t’il + tard.

Effectivement, le 6 août 1944, Ferdinand Lecouvey, 19 ans, son jeune frère Louis, leur père et quelques camarades se portent volontaires pour rejoindre les rangs de la Division Leclerc. Ils sont d’abord intégrés au 1er Bataillon de renfort ; lui-même et son père dans l’arme du Génie, son frère au Régiment de marche du Tchad (RMT), et reçoivent leur dotation militaire : « Ce qui nous fit le plus plaisir fut la remise de l’insigne de la Division, nous devenions à partir de cet instant des « gars de Leclerc » et presque tous, nous dessinâmes à la peinture blanche, la croix de Lorraine sur le devant de notre casque ».

Fin septembre 1944, il est affecté au 13e Bataillon du Génie et suit une spécialisation sur les mines, explosifs et le déminage. Il rejoint ensuite le front, en Meurthe et Moselle, et prend part aux combats qui se déroulent dans la région ainsi qu’au déminage de la zone. Son courage et son sang-froid lui valent d’obtenir une citation à l’ordre de la Brigade avec attribution de la croix de guerre.

Prenant la direction de Strasbourg, il est confronté à de très rudes combats et à une défense acharnée des forces allemandes puis finalement, le 23 novembre, c’est l’entrée dans la capitale alsacienne, objectif stratégique et symbolique que s’étaient fixés les gars de Leclerc, dès le début de leur grande et belle aventure.

Souvenons des paroles de leur célèbre Marche :

« Mais ils voulaient la Lorraine et Strasbourg – et tout là-haut dans le beau ciel d’Alsace – faire flotter notre drapeau vainqueur – c’est le serment magnifique et tenace – qu’ils avaient fait dans les heures de douleur ».

Ferdinand Lecouvey est l’un des premiers à entrer dans la ville pour réaliser ce fameux serment pris alors le 2 mars 1941 à Koufra par quelques Français intrépides, indomptables et superbement déraisonnables ; serment qui constitue désormais un joyau de notre patrimoine historique, moral et civique, et qu’il nous incombe de faire connaitre aux jeunes générations.

Une fois encore, le comportement héroïque de Ferdinand Lecouvey durant ces combats lui vaut d’être cité à l’ordre du Régiment pour son courage et son sang-froid en qualité de tireur à la mitrailleuse.

Hélas, quelques semaines plus tard, son père, sergent dans une autre Compagnie, vient l’informer d’une dramatique nouvelle : son jeune frère Louis vient d’être tué durant les combats d’HERSHEIM ; Ferdinand Lecouvey est anéanti.

Malgré ce choc, il mobilise ce qui lui reste encore de ressources afin de poursuivre le combat et c’est avec ardeur, audace et fougue qu’il participe à la réduction de la poche de Colmar ; en février 1945, il obtient une nouvelle étoile sur sa croix de guerre.

En avril 1945, il traverse le Rhin et pénètre en Bavière et enfin, le 8 mai, c’est l’annonce de la capitulation du Reich : « Une joie immense s’empara de nous. Notre canon antichar tira à blanc pour fêter l’événement. Je crois qu’on arrosa, faute de mieux, la nouvelle avec quelques orangeades ».

Démobilisé en février 1946, il retrouve la vie civile mais ces longs mois de souffrance, la perte de son frère et de tant de bons camarades, ne le quitteront désormais plus.

De la même façon, cette fraternité d’armes propre à ceux qui ont connu le feu, guidera son existence ; il sera toujours là pour les anciens de la DB, toujours prêt pour aider, secourir, épauler et aussi cultiver durant toutes ces années ce qu’il convient d’appeler « l’esprit DB ».

Toute sa vie, il continuera de porter haut les valeurs acquises au sein du 13e Bataillon du génie de la DB : allant et persévérance ; toute son existence, il gardera cette farouche volonté de transmettre le souvenir de l’héroïque parcours de la Division de fer, préserver l’héritage de la Résistance et affirmer, inlassablement, avec obstination, la présence des anciens « gars de Leclerc » en Normandie.

Pour lui, ce qui a été réalisé par quelques-uns, au début de l’épopée – ce noyau, l’âme de la DB, puis par de plus de plus de Français courageux et patriotes – doit toujours constituer une référence mais aussi et surtout une source d’inspiration et d’espérance pour les jeunes générations, en quête de repères et de sens.

De retour à la vie civile, Ferdinand Lecouvey se marie avec Charlotte le 6 août 1948 à La-Haye-du-Puits, soit 4 ans jour pour jour après son engagement à servir pour la durée de la guerre. Installé à Barbery en 1953, il participe à l’essor économique de la région en créant une société de construction. Egalement très impliqué dans la vie locale, il sera élu de la commune, conseiller municipal, maire adjoint puis maire, de 1964 à 2001 et Président du syndicat intercommunal du collège de Bretteville-sur-Laize dès 1969. En 2004, il est nommé maire honoraire.

Nous saluons son action au service de son idéal et sa passion de servir et renouvelons nos condoléances attristées à son épouse, Charlotte, ses enfants, Catherine, Philippe, Pierre, ses petits-enfants et toute sa famille.

C’est avec émotion que nous disons au revoir au Président Lecouvey, qu’il repose maintenant en paix, cette paix pour laquelle il a risqué, bien des fois, sa vie à l’âge de 19 ans ; nous sommes convaincus qu’il va rejoindre ses fidèles Compagnons de la 2e DB, ceux qui n’avaient qu’une ambition, qu’une volonté et qu’une raison d’être : le service de la France.

Nous pensons bien sûr aux plus illustres d’entre eux : les Leclerc, Dronne, Gravier, de Boissieu mais aussi aux plus modestes et non moins fervents : les Merle, Vico, Loiselet, Streiff, Seban et tant d’autres, hommes et femmes de bonne volonté, au cœur pur et fidèle, qui l’ont accompagné tout au long de l’aventure de la 2e DB et de la reconstruction de notre pays, dans cette quête infinie pour la grandeur de la France et l’honneur d’un Peuple.

Les générations qui lui succèdent n’oublient pas et n’oublieront pas son exemple, sa ferveur, son abnégation, sa persévérance.

Prenons l’engagement de poursuivre son œuvre de préservation de l’héritage moral et de transmission des belles valeurs de la 2e DB.

Crédits photographique : François Decaen.

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